Le but d'un gouvernement n'est pas de faire des profits, mais d'aider à la prospérité du pays. Malheureusement, la manière dont sont faits les comptes publics porte trop à juger de travers.
Supposons qu'un gouvernement dispose d'un million de dollars. S'il dépense ce million à la construction d'une route pour relier un secteur peuplé de la province à un secteur de population, il contribue à aider la population des deux secteurs. C'est un actif pour la province. Mais dans les livres, il est inscrit seulement comme une dépense.
Si ce même gouvernement emploie ce même million à payer une partie de la dette publique à des financiers extérieurs, le million sortira de la province et n'augmentera aucunement l'actif de la province. Mais dans les livres, il paraîtra comme une diminution de la dette.
Lequel des deux a été le plus avantageux pour la province ? Le premier, évidemment. Pourtant, c'est le premier, la dépense pour la route, qui soulèvera le plus de critiques ; et c'est le deuxième qui récoltera le plus d'applaudissements.
La valeur d'une institution publique ne doit pas se mesurer par le surplus de ses recettes sur ses dépenses, mais par le bien qu'elle fait au public.
Il ne faut donc pas demander des Maisons du Trésor : Rapportent-elles des profits au Trésor ? Mais bien : Apportent-elles des profits à la population de la province ?
On sait ce que coûtent les Maisons du Trésor, et M. Vézina s'est affairé à le dire dans sa critique. Mais qu'est-ce que les Maisons du Trésor rapportent à la population ?
Là encore, c'est comme pour le système routier : on sait exactement ce qu'il coûte ; mais nul ne peut dire ce qu'il rapporte à la population. Pourtant, personne ne niera qu'il est d'une grande utilité.
M. Vézina a cru avoir tout dit sur le bénéfice des Maisons du Trésor en mentionnant le boni mensuel aux acheteurs qui s'en servent. Il oublie que ce boni lui-même a un but : développer l'industrie de la province, en privilégiant la vente des produits de la province.
Ce but fut atteint dès le début, puisque, même avant la déclaration de guerre, le chômage diminuait sensiblement en Alberta quand il se maintenait ou augmentait ailleurs.
On comprend que, si les Maisons du Trésor ont activé l'agriculture et l'industrie albertaines, elles ont augmenté les revenus provenant, pour les citoyens, des salaires et des ventes de produits. Tout le pays en a profité.
C'est dans les familles de l'Alberta, et non pas dans le livre des comptes publics, qu'il faut aller vérifier les effets des Maisons du Trésor.
Ajoutons que le Trésor provincial lui-même, c'est-à-dire le revenu du gouvernement, tire avantage du système.
Pour en revenir à notre comparaison, un gouvernement qui établit un bon système de routes travaille à augmenter la prospérité de la province. Les gens en profitent et le gouvernement en profite. Il vient, de ce fait, plus d'argent dans le Trésor provincial. Ce n'est pas sur les routes que le gouvernement cueille cet argent, mais c'est tout de même grâce aux routes.
Les Maisons du Trésor elles-mêmes n'apportent pas des surplus au Trésor, elles lui coûtent au contraire des frais. Mais il vient plus d'argent dans le Trésor grâce à elles.
Le Trésorier de l'Alberta le sait bien, et c'est pourquoi il garde ses succursales.
Mais il est une autre manière dont les Maisons du Trésor aident puissamment l'économie albertaine. C'est la manière indirecte, et pas la moindre.
Leur concurrence, si petite soit-elle encore, fait déjà considérablement baisser pavillon aux puissances d'argent.
On sait que, dans notre province, le monopole de l'électricité a parfaitement ignoré les cultivateurs dans le passé. Mais au printemps dernier, le gouvernement Duplessis a voté une loi pour favoriser l'électrification rurale par l'intermédiaire des coopératives établies à cette fin. Et les cultivateurs ont déjà formé des douzaines de ces coopératives.
Immédiatement, le monopole s'est mis en branle pour devancer les coopératives. Les compagnies trouvaient toujours que ça ne payait pas d'établir des lignes pour porter le courant aux fermes. Elles trouvent maintenant que ça paye et veulent être les premières arrivées chez les cultivateurs.
Eh bien, c'est la même chose en Alberta pour le courant de l'argent. Les banques ont abaissé leurs taux et sont moins exigeantes pour les garanties. Pourquoi ? Parce qu'il y a les réservoirs des Maisons du Trésor. Petits, si l'on veut, comparé aux réservoirs des banques aidés d'une plume créatrice. Petits, mais capables de prendre de l'importance si les maisons financières ne se montrent pas plus généreuses.
On pourra dire que les Caisses Populaires existent déjà pour faire concurrence aux prêts bancaires. Et c'est vrai pour l'usage de l'argent. Mais qu'ont-elles pour faire concurrence à la plume créatrice de crédit ? Elles dépendent des banques pour l'existence de l'argent. Si les Maisons du Trésor aussi font affaire surtout avec l'argent existant déjà, elles possèdent tout de même un instrument d'émission qui, sans être bien producteur encore, est là comme une menace de développement au cas où les banques ne voudraient pas filer doux.
Nous causions l'autre jour des Maisons du Trésor avec deux personnages autorisés pour en parler en connaissance de cause : M. Solon Low, qui fut huit ans Trésorier de l'Alberta, et M. L. D. Byrne, l'aviseur technique du gouvernement albertain en matière d'argent et de crédit.
On admettra que l'un et l'autre sont mieux à même de savoir ce que sont et font les Maisons du Trésor, que l'avocat de Québec qui écrit dans l'Action Catholique.
M. Low remarquait, entre autres, que jamais il n'aurait pu imposer une réduction d'intérêt sur la dette publique de l'Alberta, sans l'existence des Maisons du Trésor. Les financiers ont bien crié et fait crier dans les journaux ; mais la menace des Maisons du Trésor — d'un système capable de se passer d'eux s'ils décidaient de plier bagages — les a amenés à résipiscence.
Du coup, c'est une moyenne de 4 millions de dollars par année que la province épargnait. À ce compte seul, les frais des Maisons du Trésor sont une dépense bien minime. Il n'est pas un Trésorier, pas même M. Onésime Gagnon de la province de Québec, qui ne consentirait à payer $250,000 pour avoir $4,000,000.
La dette publique de l'Alberta était de 158 millions en 1935, lorsque le gouvernement créditiste vint au pouvoir. Elle n'est plus que de 113 millions aujourd'hui. Une diminution de 45 millions.
Évidemment, l'Alberta n'a pas fabriqué 45 millions pour la payer. Mais l'impulsion donnée à l'industrie, en grande partie par le système des Maisons du Trésor, a augmenté la circulation dans la province et a permis cet accomplissement.
La dette publique de l'Alberta a été entièrement reconsolidée en juin dernier, à ce chiffre de 113 millions, et au bas taux d'intérêt de 3.39 pour cent. Or, non seulement les obligataires ont accepté ce taux réduit, mais on s'est disputé la faveur d'avoir les obligations, si bien que le gouvernement fédéral a été obligé de présenter une mesure exprès pour taxer les profits faits sur l'achat des obligations albertaines avant la reconsolidation et leur vente après la reconsolidation.
C'est l'Alberta qui, de toutes les provinces, paie le plus bas taux moyen d'intérêt sur sa dette, alors qu'elle payait du 5, 6, et 7 pour cent autrefois. Les Maisons du Trésor ont forcé les financiers à mesurer leur appétit.
Ajoutons que l'Alberta, qui n'a pas emprunté un seul sou des banques depuis l'entreprise de sa lutte
contre la tyrannie bancaire, est la seule province qui amortit sa dette régulièrement pour la payer complètement dans trente ans.
Si les Maisons du Trésor étaient un passif pour l'Alberta, comme l'écrit M. Vézina, c'est bien en Alberta, et non pas à Québec, qu'on s'en apercevrait le plus vite.
Elles furent instituées pour aider le peuple ; et si elles ne l'aidaient pas, le peuple serait bien le premier à en demander la suppression, plutôt que de continuer à les soutenir de ses deniers.
Or, non seulement le peuple les endure, mais il tient à les garder.
La meilleure preuve en est dans la conduite de l'opposition C.C.F. en Alberta. Comme toute opposition, la C.C.F. s'est plue à critiquer tous les actes du gouvernement créditiste, même les Maisons du Trésor.
Mais, lorsqu'est venue l'élection provinciale, les C.C.F. se sont hâtés de dire au peuple que, s'ils prenaient le pouvoir, ils maintiendraient le système des Maisons du Trésor.
Le gouvernement veut les garder : c'est qu'elles n'appauvrissent pas le Trésor. La population veut les garder : c'est qu'elles enrichissent la population.
Rappelons aussi que les Maisons du Trésor n'ont pas été installées d'un coup par toute la province. Le gouvernement n'en institua que 5 au début, en 1938. C'est à cause de leur succès, à cause des services bien tangibles qu'elles rendaient, que le peuple en a réclamé d'autres, jusqu'à ce que, petit à petit, un réseau complet de succursales ait couvert la province.
Le témoignage de toute la province intéressée vaut tout de même bien le témoignage du théoricien de Québec.
Le système des Maisons du Trésor vise à placer le crédit réel de la province au service des citoyens de la province. Il y réussit graduellement, soit en injectant directement du crédit nouveau pour répondre à la production nouvelle, soit en obligeant les détenteurs actuels du crédit à mieux servir la population.
La formule est bonne puisqu'elle réussit. Et nous serions heureux de la voir introduite dans la province de Québec. Mais si l'on a une autre formule aussi efficace à nous proposer, nous l'accueillerons avec plaisir. Ce serait l'occasion pour M. Vézina de mettre sa science au service de ses compatriotes.
Louis EVEN
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