Houde dans les patates

le vendredi, 01 juin 1945. Dans La politique

Le 24 avril dernier, M. Camillien Houde don­nait aux journaux un communiqué dans lequel il annonçait son intention de se présenter comme candidat à la présente élection. Il disait dans ce manifeste :

"Je ne suis inféodé à aucun parti politique, quel qu'il soit, ni directement ni indirecte­ment."

Ce qui ne l'a pas empêché, quelques jours plus tard, de prendre la direction de la campagne pour le décadent Bloc Populaire.

Ce sont là des jeux de politique qui ne doivent surprendre ni de la part de Houde ni de la part du Bloc.

Mais en joignant le Bloc Populaire, Camillien Houde n'a certainement pas ajouté une lumière dans sa lanterne.

Le Bloc est comme tous les partis politiques : ceux qui s'y rallient se mettent un bandeau sur les yeux.

Aussi, que voit-on ? Camillien Houde déclare qu'il va appuyer les candidats du Bloc et certains indépendants.

Demandez-lui qui il appuie, et considérez les personnages.

Les journaux de Québec nous apprenaient ré­cemment que Houde appuie J. Therrien dans Québec-Est et Louis Tardivel dans Québec-Sud. Voilà qui ne fait guère honneur au jugement de Camillien.

Dans son communiqué du 24 avril, M. Houde avait écrit :

"Il est temps que ceux qui nous ont trompés ou qui se sont trompés de façon si désastreu­se... laissent enfin à ceux qui ont vu clair et qui ont payé quelque peu pour leurs opinions le soin de donner cette orientation politique canadienne dans le champ fédéral et ail­leurs."

Que M. Houde applique cette phrase à son pro­pre cas, s'il le veut, c'est très bien. Mais il a les yeux bouchés lorsqu'il choisit ses compagnons.

Pour le cas de Québec-Est, par exemple, il y a plusieurs candidats, outre l'Hon. St-Laurent. Entre autres, Gérard Mercier, connu de toute la Nou­velle-France créditiste.

Préférer le pharmacien d'Odilon Dubé, J. Ther­rien, à Gérard Mercier, c'est absolument contra­dictoire avec la phrase de Houde citée ci-dessus.

Quand est-ce que ce Therrien est sorti de sa pharmacie ou a levé un petit doigt pour s'occuper du peuple ? Où sont les sacrifices qu'il a faits pour ses compatriotes ?

Therrien ne va pas à la demi-hauteur de la cheville de Gérard Mercier en fait de patriotisme concret, ni en fait de dévouement pour le bien commun. Et c'est cela que Houde veut mettre en avant devant les électeurs de Québec-Est ! Le bandeau Bloc ne manque pas d'épaisseur !

Et dans Québec-Sud, Louis Tardivel ?

Louis Tardivel a fait quelque chose dans le temps pour ses concitoyens ; c'est lorsqu'il était dans le mouvement du Crédit Social. Depuis qu'il l'a quitté pour se bloquiser, l'a-t-on vu faire un pas pour ses concitoyens ?

Houde va appuyer les candidats du Bloc, parce qu'ils sont du Bloc, et qu'il vient lui-même d'y rentrer. Pas plus que cela.

Cela veut dire qu'il va appuyer une constella­tion d'embourgeoisés et d'ambitieux qui n'ont même pas l'énergie de leur ambition. Quand ces messieurs-là sont-ils allés aux électeurs avant la campagne électorale ? Pourquoi leur amour pour le peuple les fait-il lever de leurs fauteuils juste au moment où il y a quelques honneurs à cueillir ?

M. Houde déclare aussi, dans son communiqué du 24 avril, qu'il va diriger un mouvement dans la province, pour savoir si le peuple approuve ou désapprouve l'internement dont il fut victime pendant quatre années.

Nous croyons que, comme nous-mêmes, la ma­jorité du peuple de cette province n'a jamais ap­prouvé cet internement. Nous fûmes de ceux qui protestèrent officiellement et publiquement auprès de l'Hon. Lapointe, dès le début de cet interne­ment, quand d'autres tremblaient trop pour affi­cher leur désapprobation.

Mais la présente élection ne peut rouler sur cette question-là. Il y a autre chose de plus pressé que crier contre une chose passée. D'autres pro­blèmes intéressent bien autrement et de bien plus près les familles de la province et du Canada. II s'agit de savoir si, la guerre finie, le peuple va encore être ballotté, au gré des financiers, de spé­culation en crise, de crise en guerre, de guerre en dettes, et être conduit par le bout du nez par une bureaucratie à la fois idiote et brutale.

Les trombes électorales, même celle de Camil­lien, ne peuvent remplacer l'éducation et la ré­flexion. Elles peuvent gagner les votes de la masse qui n'a pas encore pris l'habitude de juger pour elle-même, mais elles ne font rien, absolu­ment rien pour mettre une idée saine dans une seule tête. Mais gagner des votes, n'est-ce pas à cela que se bornent les aspirations des politicail­leurs du Bloc Populaire ?


Les saboteurs, au pilori !

L'élection a été une occasion de faire sortir le bout d'oreille de quelques ambitieux et de quel­ques saboteurs, qui prennent le Crédit Social pour un moyen de servir leurs intérêts égoïstes, ou que la jalousie pousse à vouloir saper notre belle or­ganisation.

Le dernier numéro de Vers Demain a parlé, sans nommer personne, des déconfitures d'un jeu­ne ambitieux venu à l'assemblée créditiste de Rimouski pour se faire choisir comme candidat, alors qu'il n'avait pas paru dans le mouvement créditiste depuis plus de cinq ans.

Dans une autre page du présent numéro, sous le titre "Houde dans les patates", nous signalons les prétentions de Louis Tardivel à vouloir donner des directives électorales aux créditistes, alors qu'il a depuis longtemps laissé le mouvement cré­ditiste pour courir des aventures dans le Bloc Populaire. Le Bloc est plus ouvert aux embour­geoisés que ronge l'envie de monter dans la poli­tique sans s'occuper des électeurs.

Mais, une fois rendus là, que ces embourgeoisés aient au moins la décence de laisser les créditistes à leur affaire.

*    *    *

Dans le comté de St-Maurice-Laflèche, le Can­didat des Électeurs est Lucien Lambert, de La Tuque, que nous sommes heureux de recomman­der à tous les créditistes, parce qu'il donne de son temps et de sa plume au Crédit Social, et parce qu'il a même consenti à sacrifier sa place de gé­rant de la Caisse Populaire plutôt que renoncer à ses activités créditistes.

Or, dans le même comté, un petit groupe d'agi­tateurs, conduit par Gérard Lacombe et Léo Fla­geolle, de Shawinigan, prétendent, " au nom de la démocratie", dicter une autre ligne de conduite aux créditistes de leur comté.

Après la publication de la candidature de Lucien Lambert, ces messieurs, qui n'en sont pas à leur premier coup de sabotage, ont convoqué une assemblée à Grand'Mère, au nom du Crédit Social, pour y faire décider de méconnaître Lucien Lambert et demander aux créditistes du comté d'appuyer René Hamel, candidat du Bloc Popu­laire.

C'est une conduite de bloquistes, pas de crédi­tistes.

René Hamel, qui n'a jamais bougé d'un pas pour le Crédit Social, a au moins le bon sens de se présenter bel et bien pour le Bloc Populaire. Ce n'est pas lui que nous blâmons.

Mais nous récusons fortement les droits à Lacombe, Flageolle et compagnie, de donner aux créditistes de leur comté des directives pour étein­dre le vote créditiste dans le comté.

Tout vote donné à René Hamel sera enregis­tré devant tout le pays comme un vote donné "au Bloc Populaire — et à bon droit. Et tout vote donné à Lucien Lambert sera enregistré devant tout le pays comme un vote donné au Crédit Social.

Le choix pour les créditistes est très simple.

Il arrive à Gérard Lacombe de crier parfois à la dictature. Est-il pire dictature que vouloir impo­ser aux créditistes l'obligation de voter pour un parti politique ou de s'abstenir de voter ?

Nous n'aurions rien à dire si Gérard Lacombe se classait ouvertement Bloc Populaire — c'est d'ailleurs le nid qui lui convient le mieux. Mais il fallait signaler cette fausse manœuvre faite sous l'étiquette de créditiste. Va-t-on demander aux créditistes de démolir en temps d'élection ce qu'ils travaillent à construire entre les élections ?


Qui offre la liberté ?

Voyez les slogans, les devises des partis politi­ques. Aucun d'eux n'ose mentionner la liberté. Seul, le Crédit Social place la liberté dans sa devise.

Les groupes politiques en présence dans cette élection ont été invités officiellement à fournir au Service de l'Information de guerre, chacun une devise appropriée, pour guider les soldats dans leurs votes. Voici les devises de chaque groupe :

Devise officielle des Libéraux : "Emploi et prospérité pour vous." Les Libéraux vous promet­tent la prospérité, mais pas la liberté, parce que leur prospérité est liée à l'emploi. L'emploi fait des hommes liés, pas des hommes libres,. Les Li­béraux vous veulent prospères, mais pas libres.

Devise officielle des Conservateurs : "Bracken fait des plans de réforme." Pas de liberté non plus là-dedans. Pour la bonne raison que, si c'est Bracken qui fait des plans, ce ne sont pas les citoyens qui font leurs propres plans. Si Bracken fait des plans pour vous, êtes-vous libres, ou êtes-vous menés par Bracken ?

Devise officielle des C.C.F. : "Sécurité après la victoire." On peut d'abord se demander comment la victoire par elle-même va signifier la sécurité économique, quand on sait très bien qu'on a eu plus de pain sur la table pendant la guerre qu'a­vant la guerre. Mais, si les C.C.F. parlent de sé­curité, ils se gardent bien de parler de liberté. C'est la dernière chose dont ils peuvent parler, puisque tout le C.C.F.-isme est fait de plans et d'enrégimentation.

Devise officielle des communistes : "Plans pour la prospérité d'après-guerre." Eux aussi sont des hommes à plans, à plans faits par eux Évidemment et imposés au public. On n'est pas plus libre avec des plans de Staline qu'avec des plans de Bracken. Les communistes n'ont jamais osé pro­noncer le mot Liberté. Ils n'ont jamais osé dire que la Russie est le pays de la liberté. Chez les communistes, il faut choisir entre les ordres des faiseurs de plans ou une balle dans le dos.

Enfin, devise officielle des Créditistes : "Sécu­rité avec liberté pour tous." Ah ! voilà qui doit parler au cœur des soldats qui se sont battus pen­dant six années pour la Liberté.

La devise du Crédit Social est la seule qui mentionne la liberté en même temps que la sécu­rité. Et cela se comprend, parce que la sécurité du Crédit Social n'est liée ni à un emploi, ni à un salaire, ni à des plans du gouvernement ; mais elle est donnée par un dividende, un dividende gratuit à tous et, à chacun, sans exception, sans enquêtes et sans conditions.

C'est le dividende qui fait la liberté en même temps que la sécurité.

C'est pour cela sans doute que les politiciens, et tous ceux qui aiment à conduire les autres par le bout du nez, sont opposés au dividende. Ils admettraient les réformes monétaires du Crédit Social, si ce n'était pas le dividende. C'est que le dividende supprime l'anneau dans le nez de l'élec­teur et la corde dans la main du politicien.

Électeurs et électrices qui aimez la liberté, qui ne voulez pas de l'anneau dans le nez, qui voulez avoir le droit et le pouvoir de faire vous-mêmes vos propres plans au lieu d'être soumis aux plans des autres, réjouissez-vous que, dans 43 comtés de la province de Québec, dans 95 du Canada, les électeurs pourront, par leur vote, réclamer le Crédit Social, son dividende et la liberté.

Tout vote pour le candidat des électeurs est une réclamation officielle et enregistrée en fa­veur de la liberté personnelle.


Créditistes de Bellechasse

Il n'y a pas de candidat créditiste dans le comté de Bellechasse. Nous le regrettons pour les crédi­tistes de ce comté, d'autant plus que tous les comtés voisins en ont un.

Le candidat "indépendant" Gustave Jobidon a bien demandé aux créditistes du comté de lui donner leurs votes, disant qu'il connaissait le Crédit Social. Peut-être connaît-il le Crédit Social, comme le diable connaît les saintes Écritures. Mais le notaire Jobidon s'est plutôt distingué par le tort qu'il a fait, et surtout par le tort qu'il a voulu faire, au mouvement créditiste si bien organisé sans lui dans notre province.

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