Le député est un représentant du peuple. Pas un représentant de son parti.
Le député qui s'occupe des aspirations communes du peuple, des besoins communs de ses électeurs, représente ses électeurs. Celui qui s'inspire du whip du parti, qui ne connaît d'autre inspiration que celle des caucus du parti, trahit ses électeurs et sert une organisation plus intéressée au pouvoir qu'au bien-être des électeurs.
Le député est-il obligé d'être un expert, un technicien, un homme compétent sur tous les sujets, depuis l'allaitement d'un bébé au fonctionnement d'une raffinerie de sucre ? Pas du tout. Le député n'a pas besoin d'en connaître plus que ses électeurs eux-mêmes.
L'expertise d'un député consiste à savoir ce que ses électeurs veulent d'un commun accord et à le réclamer du gouvernement.
De même aussi, le gouvernement n'a pas besoin d'être expert sur toutes les questions. L'expertise d'un gouvernement consiste à apprendre des représentants du peuple ce qu'il faut au peuple, et à commander les résultats aux techniciens respectifs — même aux financiers lorsqu'il s'agit de finance.
Et si les techniciens refusent d'obéir ? La solution est bien simple : que fait le gouvernement lorsque les citoyens sabotent l'ordre ?
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Mais comment un député va-t-il savoir ce qu'il faut à ses électeurs ? En écoutant son petit doigt ou en consultant la douzaine de coqs du parti de son comté ? Ni l'un ni l'autre.
Pour connaître les besoins de groupes, il doit se mettre en rapport avec les groupes vraiment représentatifs : groupes agricoles pour les besoins de l'agriculture ; groupes ouvriers pour les besoins des travailleurs ; groupes éducationnels, pour les besoins de l'éducation, etc.
Pour les besoins communs à tous et à chacun, les besoins qui ne naissent pas de l'occupation, mais qui tiennent à l'espèce humaine elle-même, il n'a qu'à se tenir en contact avec ceux de ses électeurs qui sont organisés justement à cette fin, justement pour revendiquer l'élimination des obstacles à la satisfaction des besoins communs à tous. C'est le cas, par exemple, de l'Union Créditiste des Électeurs.
Où est le plus pressé ? Évidemment dans l'élimination des obstacles à la satisfaction des besoins communs à tous. C'est d'ailleurs pour faciliter cela qu'existe la grande société. Et si ces obstacles persistent ; les réclamations particulières des groupes risquent d'entrer en conflit les unes avec les autres. L'expérience le démontre.
Le député qui se considère comme un "boss" ou un gendarme dans son comté n'est plus un représentant du peuple. Le député qui ne s'occupe que de briller ou soigner sa réélection ne représente que lui-même et ses passions.
Lorsque les électeurs n'ont pour ainsi dire plus de représentant réel, ils se détachent de la chose publique, ou bien réagissent, dans l'ordre ou le désordre.
Quand est-ce que les électeurs s'agitent ? Lorsqu'ils sont éveillés et s'occupent de leurs affaires, et que leur député dort ou ne s'occupe que de son parti et de ses affaires personnelles.