Le Saint Père a parlé au monde, la veille de Noël.
Combien réconfortantes sont ses paroles, pour nous, créditistes, qui montons l'Union Créditiste des Électeurs !
Il a dénoncé tout système d'absolutisme d'État. "S'il avait été possible, dit-il, de censurer et de corriger les actes de l'autorité, le monde n'aurait pas été entraîné dans cette guerre désastreuse, et pour éviter la répétition de telles catastrophes, il faut confier des garanties efficaces aux peuples eux-mêmes.
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Ce n'est pas toi, créditiste, qui favorises l'absolutisme d'État. Tu as compris qu'on ne pourra jamais sauver un peuple par le seul fait de changer les hommes au gouvernement ou les partis au pouvoir.
Les partis politiques tuent la liberté. Regarde-les agir : ils ne recherchent qu'une chose, le pouvoir, afin d'imposer au peuple leurs idées à eux, leur programme à eux. Imposer — n'est-ce pas une méthode d'absolutisme ?
Les partis groupent des politiciens. Ils ne bougent qu'en fonction d'élections. Leur objectif : dominer le peuple, une fois élus. Dominer — n'est-ce pas aussi une forme d'absolutisme ?
Vois les nouveaux partis eux-mêmes, comme la C.C.F. ou le Bloc Populaire. Au point de vue de la recherche du pouvoir, en quoi diffèrent-ils des plus anciens ? Certaines de leurs revendications peuvent être justifiables. Mais leurs méthodes n'en sont pas moins apparentées de très près à l'absolutisme d'État dénoncé par le pape.
Le Nazisme aussi a pu avoir parfois des intentions louables. N'empêche que sa façon de bousculer les personnes humaines, pour arriver à s'imposer, est inacceptable.
C'est la même chose pour les partis nouveaux. Qu'ont fait, par exemple, les partisans du Bloc Populaire contre la conscription, pendant que la question se débattait à Ottawa ? Ils ont convoqué quelques grandes assemblées et dit aux foules : "Nous vous l'avions bien dit ! M. King est un traître ! Seul le Bloc est contre la conscription. Joignez le Bloc Populaire. Souscrivez pour les prochaines élections du Bloc. Et vive l'indépendance du Canada !" Des applaudissements... Et ce fut tout.
Dans tout cela, les bloquistes n'ont pas caché leur préoccupation électorale. Mais le fait de s'être proclamés les seuls contre la conscription, alors que notre province entière s'était manifestement opposée à la conscription dès le plébiscite, avant la naissance du Bloc, montre clairement à quels égarements et à quels mensonges publics cette suprême préoccupation électorale peut conduire.
Jamais le peuple ne sera sauvé en se contentant d'applaudir ceux qui lui disent : "Votez pour nous et nous allons vous sauver". Jamais les partis politiques n'apporteront au peuple la libération. Leur soif de domination les place justement aux antipodes de la liberté humaine.
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Le pape a dit aussi que s'il avait été possible de censurer et de corriger les actes de l'autorité, le monde n'aurait pas été entraîné dans cette guerre désastreuse, et que pour éviter la répétition de telles catastrophes, il faut confier des garanties efficaces aux peuples eux-mêmes.
Qu'il fait bon, n'est-ce pas, d'entendre ces grands principes dans la bouche du Saint-Père ? Sans doute, il ne proclame que des principes ; il ne fait aucune application concrète. Mais il sera permis à l'Union Créditiste des Électeurs de constater avec satisfaction qu'elle n'est pas dans une mauvaise voie.
Créditiste, tu travailles actuellement à bâtir au sein du peuple une organisation appartenant au peuple lui-même ; non pas un parti, non pas un mouvement de politiciens, d'aspirants-députés, qui ne cherche qu'à envahir les parlements ; mais une grande union du peuple lui-même, en dehors des parlements. Tu veux qu'enfin le peuple surveille ses gouvernements et les force à tenir compte de la volonté commune, des aspirations conformes au bien commun.
Pendant que les partis politiques s'évertuent à gagner des élections par la manipulation de la foule, toi, tu t'appliques à former une élite de plus en plus considérable et de mieux en mieux éclairée, au sein de la multitude d'où tu la fais surgir.
Toi seul en Nouvelle-France, créditiste, tu travailles à rendre le peuple capable de censurer et corriger les actes de ses gouvernants. Toi seul, parce que ton organisation existe justement, non pas pour la conquête du pouvoir, mais pour la surveillance du pouvoir.
Corriger et censurer — par les pressions que tu fais, de concert avec ceux qui, comme toi, ont vu et compris la lumière.
Confier au peuple des garanties efficaces — cela ne veut pas dire lui faire des promesses électorales
et l'oublier ensuite sauf pour le taxer et le gendarmer. Des garanties efficaces pour surveiller et censurer ses gouvernants — ce sont des moyens pratiques pour rappeler aux gouvernants, à tue-tête s'il le faut, qu'ils existent pour servir le peuple. Et c'est cela que tu veux mettre en œuvre par ton organisation permanente des électeurs eux-mêmes. Nos représentants ne devront plus pouvoir dormir tranquilles tant que le peuple sera la victime d'exploiteurs d'hommes.
Créditistes, l'Union des Électeurs est la plus belle garantie de liberté et de paix que le peuple puisse désirer. Aime-la bien. Et pour la rendre de plus en plus efficace, travaille à la grossir sans cesse ; personne ne le fera, si ce n'est toi-même. C'est toi, par la lumière que tu portes, le grand responsable du salut de la Nouvelle-France.
Jean GRENIER