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Sous un régime créditiste

Louis Even le vendredi, 15 octobre 1943. Dans Le Crédit Social enseigné par Louis Even

La 13ème causerie de l'Union des Électeurs à la radio transportait les auditeurs en esprit sous un régime créditiste et les faisait assister à la réception, par un ouvrier, d'un dividende natio­nal :

Pourquoi pas un argent serviteur ?

Nos dernières émissions ont déchiré le voile qui jetait à dessein du mystère sur la question de l'ar­gent.

Nous avons vu que l'argent est fait par des hommes ; que sa présence ou son absence ne dé­pendent ni de Dieu ni de la nature, mais de l'ac­tion d'hommes qui émettent ou retirent l'argent.

Puis nous avons démontré que l'argent est la chose au monde la plus facile à fabriquer, la plus facile à régler selon les besoins du pays, puisque l'argent est surtout de la comptabilité. L'argent moderne, le principal argent du pays, est fait de traits de plume, de chiffres prenant naissance dans les livres des banquiers.

Et nous disions :

Si le mécanisme moderne peut faire d'un trait de plume l'argent sous forme de dette, il peut aussi bien faire d'un trait de plume de l'argent libre de dette.

Si le mécanisme moderne peut faire de l'argent pour prêter dès sa naissance, il peut aussi bien fai­re de l'argent pour mettre, dès sa naissance, direc­tement entre les mains des consommateurs, lors­qu'il n'y a rien que cela qui manque.

Si le mécanisme moderne peut fournir de l'ar­gent autant qu'il en faut pour la guerre, il peut certainement aussi bien en fournir autant qu'il en faut pour les échanges de paix.

Mais rien ne changera dans ce sens-là, si l'on n'a pas tout un peuple renseigné, uni et organisé pour exiger du gouvernement qu'il force les direc­teurs du mécanisme d'argent à le faire fonctionner pour les citoyens et non contre les citoyens.

Je reçois un dividende

Quittons un peu le tableau triste et révoltant du système d'argent générateur de dettes et se­meur de ruines, pour nous représenter un peu ce que ferait un système conforme aux faits, avec notre progrès moderne dans la production et le transport.

Supposons-nous dans une ère de paix ; cela veut dire devant une capacité énorme de production de denrées et de services de toutes sortes. Puis, avec un régime monétaire créditiste. Cela veut dire : avec un régime dans lequel l'argent est en rapport constant avec la production, et dans lequel tout argent nouveau commence directement et gratui­tement entre les mains des consommateurs.

Que chacun de nous se transporte en esprit dans cette situation, qui peut être celle de demain, pour­vu que l'Union des Électeurs devienne assez forte pour en imposer l'établissement.

C'est tout un livre, et un gros livre, qu'il fau­drait pour décrire les aspects nouveaux. Mais pre­nons-en une page, une scène particulière quelcon­que — disons celle d'un ouvrier ordinaire au mo­ment où il reçoit son dividende national.

Je suis cet ouvrier. Mon patron me paie réguliè­rement, chaque semaine, un salaire qui n'est ni méprisable ni exagéré. Disons $35.00 par semaine, $140.00 par mois.

Mais voici que le premier jours du mois, je re­çois avis que, comme tous les citoyens du pays, je bénéficie d'un dividende national, mettons de $10.00.

Qu'est-ce que cela veut dire ? J'ai travaillé, et mon travail m'a été payé : $140.00 pour le mois. Voici maintenant qu'on m'avertit que je vais tou­cher $10.00 en plus, pas pour mon travail, mais comme dividende. Et chaque membre de ma fa­mille, pareillement. Et tous et chacun dans le pays, pareillement.

Tous les travailleurs du pays ont été payés pour leur travail, et ce $10.00 que je vais toucher ne diminue en rien le salaire des autres. Et tous les $10.00 que les autres vont toucher ne diminuent en rien mon salaire.

Pourquoi ce dividende ?

Nous avons dit que cela se passe sous un régime créditiste, sous un régime qui tient l'argent en rap­port avec les produits.

Puisque, pour mettre l'argent en rapport avec les produits, on nous distribue de l'argent en plus de nos salaires, cela veut donc dire qu'il y a plus de produits offerts que le travail payé en a faits ?

Exactement. Il y a des produits faits par les machines, des produits faits par la chimie, des pro­duits faits par le courant électrique, des produits faits par les inventions. Il y a plus de produits que de labeur humain, donc plus que de salaires dis­tribués. Les faits le démontrent, puisque ceux qui ont reçu de l'argent ont acheté ce qu'ils voulaient avec cet argent, et il reste encore des produits non vendus.

C'est pour cela que le régime de logique et de bon sens, qui s'appelle régime de crédit social, dis­tribue des suppléments de pouvoir d'achat. Il fait cela, pour que les produits ne pourrissent pas faute de preneurs. Il fait cela pour que les produits ne s'entassent pas jusqu'à créer du chômage, alors que tant de familles en ont besoin. Il fait cela, pour que les producteurs n'arrêtent plus à cause de con­sommateurs qui ne mangent pas à leur faim.

Est-ce que ce n'est pas logique et humain ?

Puis ces suppléments vont à tout le monde, par­ce que c'est tout le monde qui est propriétaire du progrès. Est-ce que ce n'est pas juste que tout le monde vive un peu mieux, lorsque la science accu­mulée à travers les siècles augmente les facilités de production ?

Je sais cela. Je sais que, si l'argent augmente, c'est parce que la production du pays augmente. Je sais que, si la production du pays augmente, c'est surtout la science appliquée qui cause l'aug­mentation. Et je crois que la science appliquée est une propriété commune, un héritage commun ac­cru d'une génération à l'autre.

Aussi, je n'appelle point mon dividende du fa­voritisme, ni du paternalisme d'État ; mais de la justice pure et simple, la reconnaissance de mes droits de naissance. Et c'est le front haut que je vais toucher mon dividende. Aussi haut, pour le moins, que je le portais, lorsque j'allais payer mes taxes et surtaxes, mon tribut d'esclave aux ban­quiers, sous l'ancien régime.

Le travail est récompensé

Je sais aussi que mes achats, augmentés par ce dividende, et les achats effectués avec tous les di­videndes du pays, vont faire couler cet argent nou­veau vers ceux qui ont joint leur travail personnel au progrès pour augmenter les produits. Et je trou­ve que c'est juste. Si le progrès appartient à tout le monde et si tout le monde doit en bénéficier, le travail qui féconde le progrès doit apporter une récompense au travailleur.

Je me réjouis donc à la pensée que tous les ci­toyens vont être capables d'acheter un peu plus, et que tous les producteurs vont être capables d'é­couler leur production tant qu'elle correspond aux désirs des consommateurs.

Je me réjouis de ce que tout le monde est mieux et de ce que personne n'est lésé.

L'obstacle argent, qui a tant causé de privations, de chômage, de banqueroutes et de ruines sous l'ancien régime, n'existe plus. Au contraire, l'argent accomplit sa fonction, parce qu'il augmente quand il faut, autant qu'il faut, et à l'endroit où il faut, pour faire ce qu'il a été institué pour faire.

Et le danger d'inflation ?

Mais, est-ce que les professeurs du vieux régi­me ne nous disaient pas que cette manière de créer l'argent causerait de l'inflation ?

Comment le $10.00 que je reçois, que mes con­citoyens reçoivent, peut-il causer de l'inflation ?

L'inflation, c'est une hausse des prix. Pourquoi le prix des chaussures, par exemple, augmenterait-il du fait de mon dividende de $10.00 ? Ce $10.00 n'entre pas dans le prix de revient des chaussures. Le cuir n'a pas coûté plus cher. Le salarié non plus, puisque ce $10. n'est pas un salaire.

Le $10.00 est venu tout droit à moi, de la plume créatrice de l'office national du crédit. Dans quel coin des prix aurait-il pu se loger ?

Sans doute que si l'argent était augmenté sans aucun rapport avec la production, cela pourrait causer une demande dépassant la capacité de pro­duction. Les prix chercheraient alors à monter, fau­te de produits. Mais on est sous un régime crédi­tiste, pas sous le régime anarchique des banques, et l'argent nouveau ne vient qu'à la cadence de l'augmentation dans la capacité de produire des choses que les consommateurs veulent.

Au lieu d'inflation, on aura plutôt une diminu­tion des prix, parce que les ventes seront plus abondantes. Demandez à un imprimeur combien il vous chargera pour l'impression de 10 volumes, et combien pour l'impression de 1,000 volumes exactement semblables. Vous verrez que le prix du livre sera beaucoup plus bas lorsqu'il en imprime 1,000 que lorsqu'il en imprime seulement 10.

Et c'est ainsi pour tous les produits.

Le dividende ne va donc pas causer d'inflation. Plutôt le contraire.

Et le danger de paresse ?

Mais ce $10.00 de dividende, venant par-dessus le marché de mon salaire, ne va-t-il pas me rendre paresseux ? Est-ce que je ne vais pas être tenté d'a­bandonner mon emploi, et de renoncer à mon sa­laire mensuel de $140.00, pour me contenter du dividende de $10.00 en ne faisant rien ? Poser la question, c'est y répondre.

Ceux qui montent cette objection contre le divi­dende sont des insulteurs ou des idiots. D'ailleurs, je sais, et tout le monde dans le pays sait, que le dividende est une distribution des surplus de la production après que les salaires ont acheté ce qu'ils pouvaient acheter. Si la production (des hommes ou des machines) ralentissait, les surplus diminueraient ou disparaîtraient. Le correctif se­rait donc automatique.

Ne serait-ce point un rêve ?

Mais n'est-ce pas un rêve irréalisable, tout cela ? Peut-il jamais y avoir une telle abondance à distri­buer ?

Qu'est-ce qu'il n'y avait pas à distribuer avant 1939 ? Et pourtant que de monde chômait ! Si tous les gens valides qui s'offraient pour un emploi avaient pu trouver un travail productif en ces an­nées-là, que de biens il y aurait eu à faire entrer dans les maisons ! Mais il manquait le dividende.

Puis, pendant la guerre, quelle surabondance n'a-t-on pas distribuée ! Sans doute que toutes les choses distribuées en rapport avec la guerre ne sont pas très aimables. Mais est-il plus difficile de cons­truire un auto qu'un char d'assaut, une maison qu'un bateau de guerre ?

On a appris à faire les bonnes choses avant d'ap­prendre à faire les choses meurtrières. Malheureu­sement, on a appris à distribuer gratuitement les choses meurtrières avant d'apprendre à distribuer gratuitement les surplus des choses utiles.

Mais la lumière se fait, et c'est bientôt tout un peuple éclairé et décidé qui se lèvera pour enlever aux affameurs le droit de gérer nos vies, pour ren­voyer au repos et à l'étude les politiciens qui n'ont pas encore ouvert les yeux ou qui veulent conti­nuer de baiser dévotement les chaînes d'un méca­nisme endetteur.

Louis Even

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