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La politique, responsabilité de chacun

Gilberte Côté le dimanche, 15 avril 1945. Dans La politique

(Extrait d'une causerie de Mlle Gilberte Côté à CKAC, le 7 avril)

Je vous demande, chers compatriotes, de me dire où vous pensez que va le monde. Dites-moi donc sur quelle route l'univers s'est engagé. Dites-moi donc ce qu'il adviendra de nous tout à l'heure, la semaine prochaine, le mois prochain, lorsque la guerre finira, lorsque les hostilités cesseront. Dites-moi donc ce que deviendront nos enfants si le mon­de continue de s'avancer de plus en plus loin dans la grande confusion et les grandes misères des cri­ses et des boucheries périodiques.

En 1939, lorsque vous avez entrepris cette guer­re qui dure encore, soupçonniez-vous que la paix se ferait sous la tutelle de la Russie communiste ? Soupçonniez-vous alors que la guerre se termine­rait dans une Europe toute vouée au bolchévisme ?

Et lorsque la paix sera rétablie, songez-vous maintenant quelle sorte de paix elle sera, sous le haut patronage d'une Commission internationale, dominée par trois grosses nations qui régenteront toutes les petites de l'univers par des canons et par l'argent, à l'aide d'un état-major suprême et d'un conseil économique suprême ?

Canadiens-français, qui avez souffert d'une crise pendant dix ans, qui vous battez pour la civilisa­tion depuis bientôt six ans, qui vous préparez à une autre grande misère de chômage et à une vie de privations et d'enrégimentation, dites-moi donc, comprenez-vous quelque chose à tout ce chaos ?

*    *    *

Vous ne comprenez pas. Pourquoi, mais pour­quoi donc ?

Première raison, la plus grosse : c'est parce que le bon monde ne s'occupe pas de politique.

Non. La politique, ça c'est une chose trop mal­propre pour le bon monde. On ne connaît que la politique d'élections, qui se fait chez nous depuis soixante-quinze ans. On en a senti toute la pourri­ture, on y a même mis la main plus ou moins ; on a maintenant horreur de cet abattoir nauséabond où sont tués tous les principes de morale et de sens social.

"La politique, c'est trop sale ; je ne m'occupe pas de cela", dit-on avec un air candide d'irrespon­sable.

En effet, la politique est une chose bien sale. Mais, moi Pierre, moi Jacques, moi Victor, je suis quand même responsable de la politique.

Quand même la politique est malpropre, j'y ai mon mot à dire et j'ai le devoir de travailler à l'as­sainir. J'ai à voter. J'ai à choisir les hommes d'État. J'ai à surveiller les hommes d'État. J'ai à faire ma part pour guider les hommes d'État. J'ai à exprimer la volonté de tous aux hommes d'État.

 * * *

Chacun de nous est responsable.

Chacun de nous. Oui, cet homme-là qui passe sa vie à calculer des passifs et des actifs pour équili­brer un budget de grosse compagnie, celui-là qui ne s'en doute probablement pas, est lui-même res­ponsable du bien commun. Responsable de la crise de 1930, responsable de la guerre que nous traver­sons, responsable de la paix future, responsable du sort de ses compatriotes. Responsable, oui ; et il a le devoir de s'en occuper, et de voir à ce que tout cela se fasse dans l'ordre et pour le bien de tous.

Cet autre, qui est un ouvrier travaillant à la sueur de son front toute la semaine, et le diman­che parfois, est aussi responsable.

Chacun de nous est responsable.

Si nous étions des animaux sans âme, sans in­telligence, ce serait, dans l'ordre que nous nous abandonnions aveuglément à la conduite d'hom­mes, parce que les animaux n'ont pas d'autre chose que l'instinct : ils ne sont pas maîtres de leur des­tinée.

Mais, nous sommes des hommes intelligents et libres, et chacun de nous est responsable de sa pro­pre destinée. Dès lors qu'un être est intelligent, il est responsable. C'est Dieu qui nous a fait intelli­gents, c'est donc Dieu qui a voulu que nous fus­sions responsables. Personne ne peut y rien chan­ger. Aucun banquier, aucun Staline, aucune socié­té des nations ne peut décréter que nous ne som­mes pas responsables ni maîtres de nos destinées. C'est notre nature.

Chacun est responsable de lui-même, et des au­tres aussi, parce que Dieu non seulement nous a fait intelligents et libres, mais il nous a fait socia­bles, devant vivre avec les autres qui nous sont sem­blables par nature.

Cela implique que nous sommes responsables de nous et des autres. Chacun de nous est responsable de lui-même et des autres.

Chacun de nous est donc responsable de la bon­ne administration de la société. Et la bonne admi­nistration de la société se fait par une bonne poli­tique. Chacun de nous est donc responsable de la politique.

Chacun de nous doit donc faire de la politique.

* * *

Faire de la politique, cela veut dire voter quand c'est le temps ?

Oui, mais ce n'est pas tout.

Faire de la politique en responsable, cela veut dire prendre les moyens pour que la politique soit bien exercée. Prendre les moyens efficaces et à notre portée.

Voter tous les quatre ou cinq ans, c'est un moyen, mais ce n'est pas le seul. C'est un bien fai­ble moyen. Et ma foi, si nous nous en contentons, nous l'avons remarqué, il n'est pas bien efficace. C'est depuis que nous votons que nous avançons de plus en plus dans le chômage et les guerres.

N'y aurait-il pas un autre moyen plus efficace que celui-là ?

Il y a le moyen dont se servent les vrais maîtres du pays, les financiers : la méthode de l'achat des consciences.

C'est un moyen malhonnête. D'ailleurs, il ne peut être efficace pour réaliser le bien commun. L'achat des consciences est un moyen pour réaliser le bien des particuliers à l'exclusion du bien com­mun.

Le contraire de l'achat des consciences est la formation du député. Nous devons voir à ce que nos députés soient renseignés. Nous devons les renseigner nous-mêmes sur ce que nous savons, car les députés ne peuvent tout apprendre d'eux-mêmes. Nous sommes là pour les aider. Nous de­vons les renseigner continuellement sur la vie du peuple. Nous devons dire à nos députés ce qui se passe dans nos maisons. Nos députés n'ont pas le temps d'aller partout. C'est à nous de les informer sur les faits, de leur dire si le peuple est heureux ou misérable, de leur présenter les problèmes de nos familles, des municipalités, etc... C'est à nous, à moi, à vous, d'aller trouver nos représentants pour leur exprimer les désirs, les volontés de tous.

* * *

Il faut donc rencontrer nos députés. Il faut leur téléphoner, aller les voir, leur parler souvent, leur écrire. Leur demander, par exemple, chaque semai­ne ce qui se passe à la Chambre.

Voilà un moyen à la portée de chaque électeur, de chaque électrice, un moyen bien supérieur à ce­lui du vote tous les quatre ans ; un moyen qui nous fait connaître nos représentants et leurs problèmes, et qui fait qu'eux aussi nous connaissent et sur­tout comprennent nos besoins.

Le contact permanent entre les représentants du peuple, députés, échevins, et les électeurs, voilà un grand facteur, même indispensable, de bonne administration.

Personne n'a le droit, en face de la mauvaise po­litique, de lever les épaules, en disant : "Que vou­lez-vous qu'on fasse ?" Il y a bien des choses que l'on peut faire.

Et si tous ces moyens à la portée du peuple sont employés dans une organisation, fonctionnant en ordre et grossissant toujours, ces moyens devien­dront irrésistibles pour tous nos administrateurs, soyons-en sûrs.

Une bonne organisation, employant ces moyens très efficaces de pression, et fonctionnant en ordre, et grossissant toujours, voilà ce qu'est l'Union Créditiste des Électeurs.

Gilberte Côté


Les préférés

D'après une réponse donnée à la Chambre des Communes, par le ministre Crerar, du ter mars 1944 au 1er mars 1945, il a été admis au Canada par le gouvernement fédéral 446 réfugiés. Sur ce nombre 410 sont des Juifs. Les 36 autres se répar­tissent entre dix nationalités différentes. La pro­portion des Rabinovitch est un peu forte !

Gilberte Côté

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