En janvier dernier, la ville de Montréal et la ville de Québec refusèrent un Régisseur du logement. Dans la province de Québec, seule la ville de Hull en eut un, avec l'assentiment de la majorité de son conseil. Six autres villes dans le reste du Canada.
Mais voici que le gouvernement bureaucratique, centralisateur et socialisant d'Ottawa, vient de décréter que le Régisseur du logement pourra être imposé à n'importe quelle ville, sans s'occuper de l'opposition de la population ni de celle des conseils municipaux.
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Nos lecteurs du mois de janvier se rappellent en quoi consiste cette ordonnance 9439, et quels pouvoirs arbitraires et exorbitants elle donne à ce nouveau dictateur qu'on appelle Régisseur du logement :
1. — Pouvoir de faire des enquêtes dans toutes les maisons qu'il désirera, par des personnes choisies par lui ;
2. — Pouvoir d'entrer dans nos maisons, de les examiner, d'y exercer ses fonctions de czar ;
3. — Pouvoir de prescrire lui-même la manière d'utiliser les maisons ;
4. — Pouvoir de faire faire tous les changements qu'il voudra dans les maisons qu'il voudra. Il pourra être doux pour qui il voudra et sévèrement méticuleux pour qui il voudra. Pas d'appel ;
5. — Pouvoir de terminer ou modifier tout bail, à son gré ;
6. — Pouvoir d'imposer des locataires à un propriétaire ;
7. — Pouvoir de prendre possession de maisons pour les utiliser aux fins qu'il jugera à propos ;
8. — Pouvoir de faire exécuter ses mandats par le shérif ;
9. — Pouvoir de transférer des logeurs d'une maison dans une autre ;
10. — Pouvoir d'ordonner des réparations, des subdivisions, des modifications au propriétaire ;
11. — Pouvoir de faire punir de $5,000 d'amende et de deux ans de prison toute personne qui refuse de se soumettre aux dictées du Régisseur.
Sans doute que le Régisseur n'est pas obligé d'aller jusque-là, mais l'ordonnance lui en donne le droit, et rien ne l'empêche de le faire quand ça lui plaît. C'est un bon moyen de forcer les citoyens à ramper pour ne pas être malmenés.
C'est une violation flagrante du droit de propriété. C'est un moyen efficace de décourager ceux qui aspiraient à devenir propriétaires,
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Les communistes jubilent. Ils disent que c'est la plus belle mesure du gouvernement. Pourquoi sont-ils contents ? Parce que c'est une grave atteinte au droit de propriété,
Ilsley, le ministre au rationnement de l'argent, est aussi le ministre au contrôle des maisons. Il se plaint qu'il n'y a pas assez de maisons pour loger les vétérans qui reviennent du front, dont plusieurs avec une famille. À qui la faute ? Si l'on s'était plus occupé de loger convenablement les vivants du Canada que de creuser des tombes en Europe, la situation ne serait pas la même.
Le même gouvernement qui a imposé des restrictions sur les matériaux de construction pour alimenter la tuerie, le même gouvernement qui impose encore des restrictions sur les matériaux pour reconstruire l'Angleterre, la Russie et d'autres à 4,000 milles d'ici, s'aperçoit que nos Canadiens manquent de maisons. Solution : des bureaucrates de plus.
Combien le Régisseur va-t-il bâtir de maisons ? Zéro.
Qu'est-ce qu'il va faire ? Jouer avec les maisons des autres. C'est toujours cela que font les bureaucrates : gâter la propriété des autres.
Où est rendue la liberté, thème grandiloquent de nos propagandistes de guerre ? Au fond de la Mer Noire, avec la charte de l'Atlantique.
Pourquoi s'est-on battu pendant six ans ? Pour des prunes — ou plutôt pour des dettes, des taxes et des bureaucrates. Pourquoi a-t-on abattu Hitler ? Pour le remplacer par Staline en Europe et transporter en Amérique la philosophie çommune aux deux compères.
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Faut-il avaler cette nouvelle couleuvre ? Non.
Que faire ? Crier sur les députés fédéraux, pour qu'ils crient sur le gouvernement fédéral.
Si les députés ne savent pas qu'un défaut de logement se corrige par la construction de logements, et non pas par l'entassement des humains, il faut le leur rappeler. Ils sont portés à oublier les simples éléments parfois, par amour de leur quiétude ou par culte de leur parti.
Pourquoi se fait-on imposer de plus en plus de rationnements, de plus en plus de bureaucratie, de plus en plus d'obligatoires ? Parce qu'on se laisse faire idiotement.
D'autres pressent des boutons pendant que nous dormons. Or les politiciens obéissent aux pressions. Quelles pressions les électeurs font-ils sur leurs députés ?
Hier, la bureaucratie militaire prenait le contrôle de nos jeunes gens et les manipulaient à son gré. Aujourd'hui, la bureaucratie de Gordon prend le contrôle des maisons du Canada et les manipulera à son gré. Toujours au nom de motifs élevés, auxquels les gogos croient comme à l'Évangile.
Quels sens y a-t-il à crier que le Canada manque de maisons et qu'ils manque de brique, de tuyaux, et d'autres matériaux pour construire, quand on garde 60,000 jeunes gens à rien faire dans les camps militaires ?
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Quiconque a des yeux pour voir et une intelligence pour comprendre se doit de protester contre chaque nouveau crampon de la bureaucratie. Même si l'on n'est pas soi-même directement affecté.
L'égoïste qui dit : Cela ne me touche pas — aura son tour. C'est la technique des ingénieurs du grand plan d'enrégimentation, de n'opérer que par sections, pour rencontrer moins de résistance. Ils respectent un groupe pendant qu'ils étranglent l'autre. Si tous se tenaient ensemble et s'interposaient devant chaque attaque, aucun groupe ne serait étranglé. Mais si les épargnés temporaires laissent faire, lorsque leur tour viendra, ce ne sont pas les étranglés qui pourront les défendre.
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La Régie du logement est aussi une nouvelle incursion du fédéral dans le domaine des droits civils, qui relève des provinces.
Tous les citoyens ont le devoir de crier : Arrière ! Arrière, les bureaucrates d'Ottawa !
La Ligue des Propriétaires de Montréal a voté des résolutions de protestation. C'est bien. Mais c'est un acte collectif en passant, dont probablement personne à Ottawa ne s'inquiétera personnellement.
C'est une répétition de protestations, par des hommes individuellement conscients des droits et des libertés de la personne, qu'il faut faire pleuvoir sur des hommes publics bien déterminés. Sur quels hommes publics ? Sur ceux qui ont besoin des électeurs pour garder leurs sièges, sur les députés.
Si une protestation générale adressée au gouvernement en général ne touche à peu près personne en particulier, il n'en est pas ainsi des lettres adressées a un député par ses électeurs. À mesure que ces lettres se multiplient, le député y devient plus sensible — pour cause.
Et c'est à nos députés qu'il appartient de se démener personnellement pour faire savoir au gouvernement ce que le peuple veut et ce qu'il ne veut pas.
Si nous laissons forger les chaînes de la bureaucratie, anneau par anneau, il y en aura bientôt tant et de si fortes qu'il deviendra impossible de les briser sans des efforts beaucoup plus considérables.
Guerre au Régisseur ! Guerre à la bureaucratie ! Guerre à la politique socialisante et dictatoriale !